the bottom of the bottle is my only friend

À l’annonce impromptue d’Helios, ta première réaction est une moue boudeuse, une grimace de surprise, non contrôlées. Tu ouvres la bouche une première fois, puis la refermes, avant de répéter le mouvement une seconde fois, pour obtenir le même décevant résultat. Tu émets alors seulement un grognement de mécontentement. Dimanche, jour du seigneur, mais aussi et surtout jour du repas de famille des Yaxley. Et bien que seule la branche principale soit concernée, elle ne se réunit avec les branches mineures que lors d’occasions vraiment exceptionnelles, les domestiques sont bien entendu conviés, pour servir d’esclaves et de souffres douleurs. Alors oui, ce n’est sûrement pas la première fois que tu assises à ce genre d’événements, bien au contraire, c’est toute ta vie depuis que tu es né, ainsi que probablement ton destin jusqu’à ta mort. Cependant, tu ne prendras jamais l’habitude d’être un clébard, le clébard de quelqu’un d’autre. Et comme à chaque, tu sens cette haine bien particulière monter en toi, du fond de tes entrailles, liée à cette frustration constante, qui te prend à la gorge depuis que tu es tout petit. Alors non, effectivement, tu n’as aucune envie d’y aller. Helios ne t’a pas sorti de ce monde pour y replonger la tête la première dans le bain de sang, à chaque fois que cela chante aux Yaxley. Et bien, il faut croire que si. Tu n’es pas un clebs pour rien. On te siffle, tu accours. C’est le seul moyen que tu as trouvé pour continuer d’exister. Alors tu ne dis rien, tu ravales ta fierté, qui n’a malheureusement pas lieu d’être dans la vie que tu mènes, et tu finis les derniers papiers qu’Helios t’a confiés, en silence.

Tu traines dans les rues de Londres, tel un chat errant, ne sachant pas trop où aller ou que faire. Helios t’a donné ta soirée, très conscient que tu as besoin de te ressourcer, être seul avec tes pensées, avant ta grosse journée émotionnelle et physique de demain. En tant que bâtard, tu n’aurais pu souhaité meilleur frère. Alors tu es parti, te baladant les mains dans les poches, avec ton seul manteau sur tes épaules, ressassant tes sombres pensées pas très productives, tes pieds te guidant, dieu seul sait où, inconsciemment. Tu t’arrêtes à un moment pour t’en griller une, spécialement achetée au Fol’ Opium. Tu découvres alors que tes pas t’ont mené devant la boutique de quidditch. Tu regardes donc le dernier balai qui est sorti, qui est déposé en vitrine, avec émerveillement. Et ta frustration monte encore d’un cran. Parfois tu las l’impression que ton rêve ne se réalisera jamais. Soudainement, tu as besoin d’un verre, voire même plusieurs.

Ainsi tu te retrouves accoudé au bar du Chaudron Baveur. Tu en es déjà à ton troisième verre de whisky pur feu, et tu ne comptes absolument pas t’arrêter en si bon chemin. Ce soir, la mine est tolérée. Tant que tu es opérationnel demain, pour éviter de te prendre des coups de bâton magique, tu n’as pas non plus à être totalement frais. De toute manière personne ne sera assez attentif pour le remarquer. Hop, tu t’enfiles ton troisième verre presque cul sec. Tu sens le liquide descendre dans ton estomac tout doucement, accompagné d’une chaleur bien particulière et agréable. Tu lèves la main pour commander la même chose au barman. Tout ton salaire passe dans cette soirée de beuverie en solitaire, mais tu n’en as rien à foutre. Tu profites, tu ne penses plus à rien. Quelques petites heures plus tard, tu n’oses même pas regarder l’heure qu’il est, tu es toujours bien présent. Par contre la salle s’est vidée, et il ne reste plus que toi, ainsi qu’un autre client installé plus loin à une table dans la pénombre. Pris d’un élan de générosité, tu te tournes dans sa direction. « La prochaine tournée est pour moi. » Tu lèves ton verre dans sa direction, en signe de geste amical. Ta tête te tourne, le sol n’est pas parfaitement droit – heureusement alors que tu es toujours assis sur ton tabouret –, et tu te sens plus éméché que tu n’aurais du l’être. Mais encore une fois tu t’en fiches complètement, tu peux bien faire une nuit blanche, ce soir c’est ton soir, avant ta journée de torture de demain.